L’impudence et le narcissisme élevé au rang de don de soi, voilà ce que le show Dounia Bouzar-Farid Benyettou nous donne à voir. Le choix des dates de promotion de leur livre, durant les commémorations des massacres de Charlie et de l’Hypercasher, doit ainsi tout à la stratégie de communication. Jusqu’au scandale finalement déclenché. Lequel permet la mise en scène du retrait médiatique, une fois le buzz fait et le livre, sur les rails.
Farid Benyettou ex-mentor des frères Kouachi, n’est pas pour rien dans l’attentat contre Charlie. Il a armé mentalement les tueurs, a légitimé leur violence et préparé le passage à l’acte : un accoucheur de jihadistes.Hier il désignait les cibles à abattre et prônait le terrorisme, aujourd’hui il instrumentalise les morts dont il est en partie responsable, pour les mettre au service de sa notabilisation. Cet homme, dont beaucoup doutent de la sincérité, n’a pour seul témoin de moralité que Dounia Bouzar. Une femme qui nous a coûté cher en argent public pour une déradicalisation, dont les résultats restent à démontrer. Une femme, qui s’était déjà entichée d’une autre repentie, médiatisée elle aussi, jusqu’à ce qu’on la retrouve en partance pour la Syrie. Quel discernement !
Au-delà de l’indécence, c’est le glissement de la repentance vers l’expertise qui indispose : avoir été un prédicateur appelant au meurtre fait-donc naturellement de vous un acteur compétent de la déradicalisation ? N’avoir jamais été capable de justifier l’utilité de l’argent public dépensé, suffit-il à faire de Dounia Bouzar une autorité morale ? N’en est-on pas arrivé au bout d’un système où l’indécence se conjugue avec l’insoutenable pour enfanter faux prophètes et gourous qui contribuent à empêcher l’émergence d’une information non orientée, d’une parole publique et d’une stratégie d’action claires sur ces questions ? Confierait-on aux loups la garde des moutons, parce qu’ils promettent de penser sérieusement à l’alternative tofu ?
Voir le semeur de bourreau mis en avant le jour qui aurait dû être consacré aux victimes ne pouvait que faire polémique. Farid Benyettou aura ainsi réussi à cracher sur la tombe des journalistes de Charlie, tout en se payant le luxe de ne pas comprendre l’ire suscité et d’y répondre par la fausse abnégation et le retrait. Ajoutant la cerise de l’hypocrisie sur la pièce montée de son cynisme.
Article paru dans le Figaro Magazine de vendredi 13 et samedi 14 janvier 2017