« Ce n’fut pas Waterloo, mais ce n’fut pas Arcole ». Voilà ce qui m’est revenu en écoutant le président de la République. A chaud une impression mitigée. Mais rien qui ne puisse justifier une montée de colère. Tout le travail reste à faire et la confiance sera difficile à renouer, mais soyons honnête, la blessure est tellement profonde que même un discours en forme d’épiphanie n’aurait suffi. Ne reste plus qu’à juger au cours du chemin de ce que sera le dialogue promis avec la Nation.
Le début de l’intervention du président m’a fait craindre le pire. Commencer par les violences c’était exactement ce qu’il ne fallait pas faire. Cela donnait l’impression qu’il mettait en avant tout ce qui pouvait l’exonérer de sa part de responsabilité. Le tunnel me parut long et la forme un peu surjouée. La mise en accusation de l’irresponsabilité de l’opposition, certes réelle, pouvait mal passer alors qu’à ce stade, lui ne reconnaissait rien.
Puis vient la prise en compte de la légitimité de la colère. L’ordre inverse m’eût paru plus judicieux. Sur ce point il fut assez juste dans les mots choisis. Vint le temps de « prendre sa part ». Il reconnaît la blessure. Mais a du mal à s’excuser. D’ailleurs il ne le fait pas.
Le reste va dans la bonne direction mais derrière le pacte à renouer avec les Français, on ne voit rien de concret ni de construit, avancer. L’homme commence à comprendre mais parait ne pas encore savoir quelles réelles conclusions en tirer. Il lui faut proposer un contenu à ce pacte. S’appuyer sur les élus locaux n’est pas une mauvaise idée, mais songer à les faire dépositaires des cahiers de doléances des citoyens, non que l’on puisse même songer à répondre aux besoins individuels, mais parce que c’est ainsi que l’on pose un diagnostic de la situation réelle du pays. Des histoires individuelles qui se révèlent des schémas répétitifs plus parlant que des statistiques et sur lesquelles on peut agir concrètement. C’est un bon début pour renouer un dialogue. A condition de passer du mode récrimination au mode action. Qu’est-ce que collectivement on peut faire pour refaire fonctionner ce pays avec ses habitants et pas selon des ratios statistiques ? Comment retisser les liens d’une société déchirée qui ne refait corps que dans son rejet du pouvoir ? La tache n’est pas petite et là où je rejoins Emmanuel Macron, c’est que le moment peut être historique mais pas sans que sa remise en cause soit réelle et son discours, fécond.
« Le problème c’est que la chanson s’appelle « au suivant »… Bon ceci dit l’inconscient n’a pas toujours raison. C’est même souvent le contraire quand il se met à diriger. La question est « Emmanuel Macron a t’il aussi compris qu’il lui fallait changer en profondeur et ses façons et ses méthodes de gouvernement voire son gouvernement ? ». On attend la deuxième étape car il ne peut refuser de tirer de conclusions institutionnelles de cette crise.
Et pour l’instant reconnaissons-le, on est en droit de trouver que cela fut peut-être un peu léger.